En 2018, le Cigref a ajouté un nouveau cercle à son catalogue d’activités, le Cercle « Géopolitique du cyberespace », présidé par Jean-Christophe Lalanne, DSI du groupe Air France KLM et Vice-président du Cigref.
A la deuxième question, Pascal Boniface observe qu’à côté des formes classiques de la puissance, notamment militaire et économique, celle-ci est moins fondée sur la coercition que sur la conviction et l’influence. Les acteurs de ce phénomène ne sont plus uniquement les Etats, qui ont perdu le monopole de l’action internationale. Les grandes entreprises ont acquis une place déterminante dans ce paysage, en développant des stratégies de puissance autonomes sur leurs territoires propres, économiques et géographiques. Elles sont bien inspirées en s’appropriant les méthodes de raisonnement de la géopolitique pour appréhender leurs territoires de rivalités.En réponse à la première question, Pascal Boniface nous a brossé une brève histoire de cette discipline, apparue à la fin du 19ème siècle. Pour résumer sa vision, cette discipline s’attache à l’étude des rivalités de toutes natures, politiques, économiques, sociales, sur les territoires. La géopolitique est une façon de comprendre le monde, désormais essentielle dans le contexte de la mondialisation.
S’il n’a pas répondu directement à la troisième question, Pascal Boniface a cependant développé quelques pistes intéressantes. Il a insisté sur la contraction de l’espace et du temps qu’induit le numérique, pointé la place de l’Internet dans le soft power américain, et commenté les raisons de la différence de perception de la data privacy entre les peuples occidentaux et chinois. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité de ne pas construire de dépendance avec un fournisseur unique, mais de diversifier ces dépendances.
Le 9 mars dernier, nous avons reçu David Martinon, ambassadeur pour le numérique, sur le thème de la géopolitique de la gouvernance mondiale de l'Internet.
David Martinon est revenu sur l’échec des discussions engagées sous l’égide de l’ONU au sein du groupe des experts gouvernementaux. Il constate l’absence de progrès des instances multilatérales pour la sécurité de l’Internet et le caractère trop partiel de la Convention de Budapest sur la cybercriminalité. Des questions pressantes en matière de cybersécurité restent actuellement sans réponse comme l’interdiction du hack back, la gestion mondiale des vulnérabilités, le contrôle de la commercialisation des armes logiques. Ces questions devront sans doute être traitées par une instance comme le G20.
Henri d’Agrain - Délégué généralLe Cigref va poursuivre en mai prochain ce travail d’investigation géopolitique, discipline fertile pour comprendre le contexte dans lequel des entreprises globales développent leurs stratégies numériques. La prochaine réunion sera consacrée à la géopolitique de la donnée et des datacenters, et les perspectives pour le marché mondial du cloud.